Bien entendu, tout cela n'est qu'anecdotique face aux sujets importants comme la crise qui contrairement à ce que la pensée unique voudrait faire croire, continue à étendre son emprise, ou l'action consternante du gouvernement, à travers notamment ce piteux débat sur l'identité nationale. Pourtant, il s'agit d'un évènement significatif sur le strict plan sportif et illustratif également de certaines tendances sociétales.
Je parle bien évidemment du match de barrage entre la France et l'Irlande, concernant la qualification pour le mondial de foot. Une partie calamiteuse de la part de l'équipe française, conclue par un but non valide suite à une tricherie grossière de Thierry Henry. Résultat : une élimination totalement injuste de l'Irlande qui certes n'était pas qualifiée au moment du but, si le résultat s'en était tenu là, mais qui avait pendant tout le match, bousculé des joueurs tricolores complètement inhibés par l'enjeu et auteur d'une prestation proprement ridicule, indigne d'un grand pays de football et à fortiori d'une compétition réunissant l'élite mondiale de ce sport.
C'est un sentiment de honte et de gêne qui m'étreint aujourd'hui, corollaire d'une part, d'un niveau de jeu insigne, indigne, insipide, de l'équipe que je supportais, d'autre part du geste plus que volontaire de l'attaquant français qui ne fait qu'insister sur l'incapacité de cette équipe à disposer d'un adversaire pourtant en théorie largement à sa portée. Le fair-play n'est pas une notion facultative en sport et il a été cruellement absent dans le camp français et ce n'est pas dans notre culture. Voilà pourquoi je me sens floué et honteux aujourd'hui car ce petit scandale bénin car ne relevant que du sport, s'ajoute à différentes atteintes à certaines valeurs auxquelles je tiens et qui caractérisaient notre pays.
Quid aujourd'hui et surtout depuis que la droite gouverne ce pays depuis 2002, du panache, de la droiture, de l'égalité et de la fraternité, bientôt de la liberté, de la solidarité, de l'hospitalité ? Autant de caractères en déshérence quand ils ne sont pas simplement foulés aux pieds. Finalement, quoi de plus représentatif de l'ambiance actuelle que ces petits soulagements mesquins après le coup de sifflet final, de Domenech l'incompétent, qui en deux ans ne s'est toujours pas attelé au chantier de reconstruction d'une défense bleue qui fait pitiée, qui réussit l'exploit de faire déjouer Gourcuff en lui imposant probablement un positionnement et un shéma tactique complètement inapproprié à ses qualités, qui n'est strictement pour rien dans l'émergence d'un gardien de haut-niveau (Lloris), de la direction de TF1 qui a sans doute pensé qu'on aurait pu tricher plus tôt, de tous ces politiques qui se cachent derrière tous les paravents pour mieux faire oublier leur responsabilité dans la crise et leur gestion déplorable d'icelle. Ce match est le témoin d'une France qui rapetisse pour se mettre à l'échelle de son président minuscule.
Plus que jamais à mon sens, la fin ne justifie pas les moyens, que l'enjeu soit important ou beaucoup plus superficiel, comme pour ce match de foot. L'Irlande s'en remettra certes. Elle a d'autres chats à fouetter, par exemple redresser son économie plombée par des choix ultra-libéraux qui ont donné pleine prise aux conséquences de la crise. Mais elle ne méritait pas d'être éliminée de la course au mondial de cette façon, par des amis français de moins en moins recommandables, après 120 mn exemplaires de la part de ses compétiteurs. J'espère que tout le monde aura noté la dignité avec laquelle ils ont accepté ce coup du sombre héros (jeu de mots footballistique). En 82, je me souviens aussi de la tristesse noble des Platini et associés après un autre acte d'anti-jeu caractérisé. Dans ce cas là, on gagne nettement à être du côté des perdants...
Dans un monde idéal, il faudrait rejouer cette partie. L'équipe de France ne pourrait que s'y racheter, notre pays regagner un peu de dignité, y retrouver un peu de l'identité qu'il cherche ailleurs à des fins funestes...