Dimanche aura lieu le premier tour des élections législatives, sans doute plus importantes que les présidentielles mais dont la campagne aura été noyée par la conjonction d'une fatigue citoyenne, d'une apathie des media concernant les débats de fond, pour mieux se concentrer une nouvelle fois sur les querelles de personnes et les amalgames faciles et discriminants. Les thèmes pourtant cruciaux ont donc été totalement éludés, au grand bénéfice des formations principales et du seul parti anti-système autorisé par l'establishment, le Fn.
La crise s'étant comme prévu une nouvelle fois aggravée, mettant définitivement à terre la quatrième économie européenne, l'Espagne, il serait pourtant primordial de débattre des véritables solutions à apporter pour éviter une évolution dramatique et potentiellement explosive. Il se trouve que seul le Front de Gauche propose une direction différente du funeste cocktail d'austérité et de libéralisations qui démontre sa toxicité partout où il est administré : la Grèce, l'Espagne, le Portugal sont en récession, l'Irlande est incapable de se sortir de la nasse, les autres pays végètent en attendant leur tour, y compris l'Allemagne.
Partout au nom de l'euro et d'une illusoire compétivité, il est exigé de réduire le périmètre de l'Etat, de ses protections sociales, de baisser les salaires quel que soit le secteur, d'assouplir le marché du travail, de privatiser pour que les vautours se nourrissent de la bête, toujours au détriment des populations les plus défavorisées. Partout, cela fait péricliter l'économie, ce qui fait dire aux néolibéraux qu'il faut renforcer encore davantage le traitement de choc, qui n'aura pourtant que les mêmes effets déjà constatés. Pendant ce temps, certains se gavent des liquidités quasiment offertes par la banque centrale européenne, quand ils font payer jusqu'à 7% d'intérêt pour financer la dette de certains états.
La spéculation s'en donne toujours à coeur joie alors même sque le système financier est à deux doigts de l'effondrement comme le prouve, entre autres, la situation des banques espagnoles. Ferreri et sa Grande bouffe ne sont pas très loin...
Cette crise est une crise de la solvabilité. De façon très schématique et simplifiée, pour privilégier la rente, les gouvernements occidentaux ont depuis les années 70 mis en place un système où l'endettement compense la fuite des revenus vers le capital, au détriment du travail. 2007 a marqué la fin du crédit comme substitut pour alimenter la consommation. Ce qui est en jeu est donc la répartition des richesses et il n'y aura pas de réponses pertinentes sans réduire les inégalités. C'est précisément ce que propose le Front de Gauche en s'engageant à promouvoir une autre gestion de l'euro, avec une BCE qui prêterait directement aux Etats, à la fois pour arrêter d'alimenter la dette par les intérêts qu'en exige les prêteurs privés et les priver de leur moyen de chantage par le biais des taux. Une fois la finance désarmée, il sera possible de la restructurer pour désamorcer le siphon qu'elle a créé dans l'économie, c'est à dire cette recherche éperdue de la rentabilité qui a conduit à la désindustrialisation de nos pays et à la régression sociale pour les gens bénéficiant encore d'un emploi. L'ennemi c'est bien le système bancaire, pas l'immigré, le chômeur ou le fonctionnaire.
Par ailleurs, le Front de Gauche a pour projet de rediriger la richesse produite, dans le souci de la préservation de l'environnement, vers les travailleurs : hausse des salaires pour redonner du soufle à la consommation, tout en s'éloignant du consumérisme matérialiste ; imposition plus progressive en multipliant les tranches afin que les classes moyennes ne soient plus celles qui supportent quasi seules la ponction nécessaire de la fiscalité redistributrice; lutte contre l'évasion fiscale, dont un journaliste de la Croix, Antoine Peillon, après une enquête de longue haleine, a déterminé qu'elle privait chaque année l'Etat de ressources équivalant au 1/6ème de son budget total, etc...
Ceci n'est qu'un petit exemple du programme l'Humain d'abord, qui a pour objectif de sortir par le haut d'une crise systémique qui, faute d'être traitée correctement, peut potentiellement nous mener à la catastrophe. La gauche social-démocrate, le Ps, n'a malheureusement pas pris la mesure du problème et en reste à des mesures superficielles, tout en affichant son respect de l'orthodoxie européenne, qui est pourtant directement responsable de la situation. Je ne parle même pas de l'Ump qui est elle, la thuriféraire sans nuance de solutions appliquées depuis trente ans avec le succès que l'on sait. Est-il besoin de préciser que les projets de l'extrême-droite, dont les derniers agissements en date dans la circonscription d'Hénin-Beaumont, témoignent de son ancrage fasciste définitif, ne sont destinés qu'à opposer les plus fragiles entre-eux pour mieux préserver les riches nationaux dans leurs privilèges et leur pouvoir.
Il est donc plus que nécessaire d'envoyer un maximum de députés du Front de Gauche à l'Assemblée nationale, afin qu'ils pèsent sur la législature, afin que le Ps qui semble devoir être en tête de la gauche, ne puisse pas s'enfermer dans ses tropismes libéraux qui lui seraient fatals en même temps qu'à la France et à l'Union européenne. Au moment où la Syriza, le Front de Gauche grec est peut-être sur le point de devenir la première force politique de ce pays ravagé par les politiques décidées par le FMI, la commission européenne et la BCE, ce serait un signe fort à donner que de montrer que des peuples de l'Union ont compris que leur intérêt était de se dresser contre l'opression des financiers et de leurs affidés. Ce serait la première étape d'un renversement du rapport de force au détriment de l'ordo-libéralisme (austérité, compression salariale, effacement du politique dans la direction de l'économie etc) tristement incarné par Angela Merkel ces dernières années. Cela signifierait aussi aider François Hollande à réussir le mandat qui lui a été confié et en même temps, sauver la gauche...
J.-L. Mélenchon - 20h France 2 08.06.2012 par lepartidegauche